Nous avons rencontré Doriana Tinello, doctorante du CIGEV (Centre interfacultaire en gérontologie et d'étude des vulnérabilités de l'UNIGE) et membre du Centre LIVES. Elle partage avec nous ce qui l'a menée à débuter un doctorat ainsi que les défis de sa recherche.
Qu’est-ce qui vous a motivée à vous lancer dans un doctorat?
En réalité, lors de ma formation post-grade pour l'obtention du titre de psychothérapeute, j'ai ressenti le besoin de renforcer mes connaissances en psychophysiologie. C'est ainsi que je me suis intéressée à des méthodes novatrices, encore peu connues en Suisse à l'époque (en 2015), telles que le Biofeedback de la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC) et le Neurofeedback.
L'avantage de ces approches repose sur la possibilité de modifier, par rétroaction (feedback), l'activité du système nerveux autonome ainsi que l'activité des ondes cérébrales. En tant que praticienne en Biofeedback de la VFC, j'ai pu observer des résultats intéressants chez les personnes âgées, notamment en termes d'amélioration de la gestion des émotions, de stabilisation de la tension artérielle, de focalisation, etc.
Face au manque de littérature sur l'effet du Bio et Neurofeedback sur cette population, j'ai décidé d'approfondir ce sujet. C'est ainsi que j'ai proposé au Prof. Matthias Kliegel un projet de recherche, visant à explorer l'efficacité et la faisabilité d'une intervention combinant le Biofeedback et le Neurofeedback sur le contrôle de l'inhibition chez les personnes âgées.
Je tiens à exprimer ma gratitude envers le Prof. Kliegel qui a cru en ce projet, qui a été intégré à mon doctorat. Par la suite, l'entraînement des fonctions cognitives chez les populations vulnérables est devenu le thème central de ma thèse.
Vos recherches impliquent des psychologues et des économistes. Comment concilier ces deux domaines en apparence si différents?
Le maintien de fonctions cognitives optimales est d'autant plus important que les individus vivent aujourd'hui plus longtemps et sont souvent confrontés à des changements dans leur environnement de travail, ce qui nécessite une formation et un apprentissage continus. Une bonne santé cognitive est donc essentielle pour s'adapter avec succès à une vie plus longue et plus productive.
Le fonctionnement cognitif est toutefois un aspect à multiples facettes qui varie d'un individu à l'autre tout au long de la vie et qui est influencé par de nombreux facteurs, notamment la génétique, l'éducation, les facteurs psychologiques et motivationnels, le statut socio-économique, l'activité physique, la qualité du sommeil, les maladies aiguës. Dans le contexte de notre recherche avec les demandeur·euses d'emploi, une étude unique en son genre, nous avons exploré l'impact d'une intervention multimodale sur différentes variables cognitives, psychologiques, et occupationnelles, conciliant deux champs très distincts mais très complémentaires comme la psychologie du développement cognitif et l'économie.
Est-ce que vous pensez que vos résultats peuvent avoir un impact sur la prise en charge des personnes âgées?
Mes projets de thèse ont été conduits pendant la période de la COVID-19, ce qui pourrait avoir eu un impact sur le nombre de participants, potentiellement altérant leur motivation à s'engager dans les entraînements au fil des mois. Malgré ces défis, il est crucial de souligner que les interventions impliquant plusieurs composantes (telles que la cognition, la physiologie et l'exercice physique) offrent une prise en charge holistique des personnes âgées et démontrent le plus grand nombre de bénéfices. De plus, la plasticité du système nerveux permet des améliorations tout au long de la vie, même chez les individus vulnérables!