En Suisse, les minorités sexuelles sont de mieux en mieux tolérées et les lois récemment votées permettent de se rapprocher de l’égalité. Il n’est cependant pas encore certain que l’on perçoive effectivement ce changement de perception. La Dre Leïla Eisner a focalisé sa thèse sur la dynamique entre la perception de la tolérance envers les minorités sexuelles et les modifications légales en la matière et montre un cercle vertueux.
Dans son travail intitulé «Social Change and Perceived Societal Norms: an Application to Sexual Minorities in Switzerland », la Dre Leïla Eisner montre d’abord que l’intolérance envers les minorités sexuelles est surestimée. En effet, la psychologue sociale a mesuré l’opinion des participants ainsi que leur estimation de la norme sociale sur l’homoparentalité masculine, l’homoparentalité féminine et le mariage pour tou·te·s. Dans les trois cas, la norme perçue est jugée moins favorable que l’opinion personnelle. Ce décalage a malheureusement un impact sur les minorités elles-mêmes ainsi que sur leur entourage.
Ensuite, la Dre Eisner s’est intéressée à l’effet que ces perceptions pouvaient avoir sur l’activisme social. Dans ce cadre, l’étude conduite auprès de 1220 personnes appartenant à une minorité sexuelle par le biais d’associations LGBTIQ lui a permis d’observer un effet ambivalent. D’une part, l’augmentation de la colère face aux injustices subies par les personnes LGBTIQ augmente également la volonté de s’engager. D’autre part, le sentiment que la société reste intolérante démotive l’action collective. Pour Léïla Eisner, les activistes doivent prendre en compte cet effet paradoxal.
Modifications légales et perception de la norme - Qui de la poule ou de l’œuf ?
Dans sa dernière étude, les modifications légales ont été introduites dans l’équation. Il apparaît que les changements de la situation légale des minorités sexuelles aident à l’ajustement de la perception. Les nouvelles lois offrent ainsi un nouveau système pour cette population. Et selon Léïla Eisner, l’ensemble de la société bénéficie de ce nouveau système, étant donné qu’il change non seulement la perception des minorités sexuelles, mais également la perception de la norme.
Les membres du jury ont félicité la Dre Eisner pour la qualité de son travail, qui montre l’impact des croyances sur les comportements individuels et, par un effet boule de neige, sur les actions et décisions de politique publique. Par ailleurs, l’engagement personnel de la Dre Eisner, qui a travail avec les minorités sexuelles du canton de Vaud et non seulement à leur propos, a été salué. Léïla Eisner a terminé sa défense en soulignant l’importance de communiquer au grand public les résultats obtenus par les chercheuses et chercheurs universitaires. « C’est important d’avoir cette perspective en tant que chercheur·e, conclut-elle. Une façon de rendre quelque chose à ceux qui nous financent. »
Le Centre LIVES propose un Programme doctoral qui s’adresse en premier lieu aux doctorant·e·s des sciences sociales et de psychologie intégrant une problématique parcours de vie dans leur travail. Ce programme vise à favoriser des cursus qui aboutissent à des doctorats de qualité dans des délais raisonnables ainsi que l'insertion professionnelle, notamment dans des carrières académiques.